Depuis quelques années, cette fête nationale est tombée dans la banalité de la célébration officielle.
L’Algérie a célébré, hier, le 46e anniversaire de son Indépendance. Cet anniversaire est-il différent de tous ceux qui l’ont précédé? Comme chaque année, une commémoration officielle et des recueillements sur les tombes des martyrs et des cérémonies en l’honneur de ceux qui ont combattu pour libérer le pays, ont été observés. Et puis sans plus.Depuis quelques années, cette fête «nationale», pourtant symbolique, est tombée dans la banalité de la célébration officielle. Mis à part le côté «chômé, payé», le 5 Juillet est de moins en moins considéré par les citoyens que d’aucuns interprètent comme un manque flagrant de patriotisme et de civisme. C’est donc un constat amer que l’on fait chaque année, à la date de cette fête qui fait notre identité, et la journée d’hier n’était pas en reste. Et pour cause, les citoyens algériens ont appliqué le principe de «la journée chômée, payée» au pied de la lettre. Puisqu’à peine la journée commencée, les rues étaient désertes et les commerces en congé. On aurait pu penser que cette désertion traduisait justement une implication de ces derniers à cette fête nationale, mais on se serait trompé car ce n’était nullement le cas. En effet, si on faisait l’inventaire des activités de ces derniers lors de cette journée, on aurait retrouvé que certains sont partis à la plage, d’autres ont pique-niqué, d’autres encore sont restés chez eux à regarder les «festivités» à la télévision ou faire une sieste. Les rares personnes, qui ont fait un geste envers ceux sans qui, ils seraient toujours sous l’emprise coloniale, sont parties se recueillir sur les tombes des martyrs parfois membres de leurs familles ou ont salué l’opération «un drapeau dans chaque foyer» en accrochant ce dernier chez eux.N’est-il pas ingrat de constater que la majorité des citoyens n’ont pas commémoré cette journée glorieuse qui a marqué l’histoire du pays, qui a vu couler le sang de près d’un million et demi de martyrs.Le constat est d’autant plus amer lorsqu’on regarde de l’autre côté de la rive et que l’on voit comment les autres pays occidentaux et orientaux fêtent leur «indépendance day». Prenons l’exemple américain. Cette puissante nation suscite le patriotisme de ses citoyens dans les quatre coins du pays, qu’ils soient en temps de guerre ou en temps de paix. Chaque année, les Etats-Unis célèbrent la fête de leur indépendance le 4 juillet, journée de célébration patriotique et de réunions familiales dans tout le pays.Pour ce dernier qui veut instaurer la culture du patriotisme chez tous ses citoyens, la fête de l’indépendance est une grande occasion «civique», qui repose sur la tradition anglo-américaine de la liberté politique. Ainsi, pour célébrer ce jour, la société américaine a tout fait pour impliquer davantage ses citoyens à la vie sociale, politique mais aussi historique, et ce, en transformant cette date en un spectacle vivant, durant toute une journée.Pour ce faire, des pique-niques appelés «garden-partys» sont organisés dans chaque coin vert du pays, accueillant ainsi des familles entières autour d’une cuisine américaine typique et surtout autour de récits historiques et héroïques sur la liberté.Par ailleurs, des feux d’artifice ont lieu un peu partout dans le pays. A New York par exemple, un grand magasin appelé «Macy’s» organise, depuis trente ans maintenant, un feu d’artifice le 4 juillet. En 2005, trente-cinq mille pièces d’artifice ont jailli de sept bateaux situés dans l’«East River» et dans le port de New York pour éclater pendant trente minutes au-dessus de la ville. Plus de trois millions de personnes ont assisté à ce seul feu d’artifice qui est aussi retransmis à la télévision depuis quelques années. Outre ces festivités, le 4 juillet est aussi une occasion économique, lançant ainsi de grands travaux publics comme celui de la construction du canal Erié, du monument à la mémoire de George Washington et de la ligne de chemin de fer «Baltimore and Ohio». Autre pays, autre continent, la Tunisie. Tous les acteurs sociaux du pays voisin, préparent, chaque année, un programme riche pour fêter l’Indépendance le 20 mars, coïncidant aussi avec la fête de la Jeunesse du 21 mars de chaque année.Des activités culturelles, artistiques mais aussi sportives sont inscrites au programme national de cette journée de festivités auxquelles tout le monde est convié. Pour son 14 Juillet, la France célèbre la «journée révolutionnaire parisienne» synonyme de la prise de la Bastille. Associé aux bals et aux feux d’artifice, le défilé parisien des troupes françaises est généralement le spectacle par excellence. Ce défilé, qui suscite l’intérêt d’un large public, implique différents corps militaires et de police au sol, à pied, à cheval ou motorisés, défilant à tour de rôle. Compte tenu de ces faits et après 130 années de colonisation, aller à la plage, à la montagne ou rester chez soi à regarder la télévision en guise de célébration, signifie qu’il y a un sérieux problème au sein de la société algérienne.Cette grande fête-anniversaire, qui devrait être célébrée comme la journée de libération et être solennisée avec grand apparat par des défilés ainsi que des spectacles, des jeux, des sports, des fusils, des cloches, des feux de joie et des illuminations, d’un bout à l’autre de notre pays, inscrivant cette date maintenant et à jamais, est maintenant délaissée par nombre de citoyens, au grand dam de nos aïeuls et de notre histoire.
Yasmine ZOUAGHI L'EXPRESSION 05/07/2008
L’Algérie a célébré, hier, le 46e anniversaire de son Indépendance. Cet anniversaire est-il différent de tous ceux qui l’ont précédé? Comme chaque année, une commémoration officielle et des recueillements sur les tombes des martyrs et des cérémonies en l’honneur de ceux qui ont combattu pour libérer le pays, ont été observés. Et puis sans plus.Depuis quelques années, cette fête «nationale», pourtant symbolique, est tombée dans la banalité de la célébration officielle. Mis à part le côté «chômé, payé», le 5 Juillet est de moins en moins considéré par les citoyens que d’aucuns interprètent comme un manque flagrant de patriotisme et de civisme. C’est donc un constat amer que l’on fait chaque année, à la date de cette fête qui fait notre identité, et la journée d’hier n’était pas en reste. Et pour cause, les citoyens algériens ont appliqué le principe de «la journée chômée, payée» au pied de la lettre. Puisqu’à peine la journée commencée, les rues étaient désertes et les commerces en congé. On aurait pu penser que cette désertion traduisait justement une implication de ces derniers à cette fête nationale, mais on se serait trompé car ce n’était nullement le cas. En effet, si on faisait l’inventaire des activités de ces derniers lors de cette journée, on aurait retrouvé que certains sont partis à la plage, d’autres ont pique-niqué, d’autres encore sont restés chez eux à regarder les «festivités» à la télévision ou faire une sieste. Les rares personnes, qui ont fait un geste envers ceux sans qui, ils seraient toujours sous l’emprise coloniale, sont parties se recueillir sur les tombes des martyrs parfois membres de leurs familles ou ont salué l’opération «un drapeau dans chaque foyer» en accrochant ce dernier chez eux.N’est-il pas ingrat de constater que la majorité des citoyens n’ont pas commémoré cette journée glorieuse qui a marqué l’histoire du pays, qui a vu couler le sang de près d’un million et demi de martyrs.Le constat est d’autant plus amer lorsqu’on regarde de l’autre côté de la rive et que l’on voit comment les autres pays occidentaux et orientaux fêtent leur «indépendance day». Prenons l’exemple américain. Cette puissante nation suscite le patriotisme de ses citoyens dans les quatre coins du pays, qu’ils soient en temps de guerre ou en temps de paix. Chaque année, les Etats-Unis célèbrent la fête de leur indépendance le 4 juillet, journée de célébration patriotique et de réunions familiales dans tout le pays.Pour ce dernier qui veut instaurer la culture du patriotisme chez tous ses citoyens, la fête de l’indépendance est une grande occasion «civique», qui repose sur la tradition anglo-américaine de la liberté politique. Ainsi, pour célébrer ce jour, la société américaine a tout fait pour impliquer davantage ses citoyens à la vie sociale, politique mais aussi historique, et ce, en transformant cette date en un spectacle vivant, durant toute une journée.Pour ce faire, des pique-niques appelés «garden-partys» sont organisés dans chaque coin vert du pays, accueillant ainsi des familles entières autour d’une cuisine américaine typique et surtout autour de récits historiques et héroïques sur la liberté.Par ailleurs, des feux d’artifice ont lieu un peu partout dans le pays. A New York par exemple, un grand magasin appelé «Macy’s» organise, depuis trente ans maintenant, un feu d’artifice le 4 juillet. En 2005, trente-cinq mille pièces d’artifice ont jailli de sept bateaux situés dans l’«East River» et dans le port de New York pour éclater pendant trente minutes au-dessus de la ville. Plus de trois millions de personnes ont assisté à ce seul feu d’artifice qui est aussi retransmis à la télévision depuis quelques années. Outre ces festivités, le 4 juillet est aussi une occasion économique, lançant ainsi de grands travaux publics comme celui de la construction du canal Erié, du monument à la mémoire de George Washington et de la ligne de chemin de fer «Baltimore and Ohio». Autre pays, autre continent, la Tunisie. Tous les acteurs sociaux du pays voisin, préparent, chaque année, un programme riche pour fêter l’Indépendance le 20 mars, coïncidant aussi avec la fête de la Jeunesse du 21 mars de chaque année.Des activités culturelles, artistiques mais aussi sportives sont inscrites au programme national de cette journée de festivités auxquelles tout le monde est convié. Pour son 14 Juillet, la France célèbre la «journée révolutionnaire parisienne» synonyme de la prise de la Bastille. Associé aux bals et aux feux d’artifice, le défilé parisien des troupes françaises est généralement le spectacle par excellence. Ce défilé, qui suscite l’intérêt d’un large public, implique différents corps militaires et de police au sol, à pied, à cheval ou motorisés, défilant à tour de rôle. Compte tenu de ces faits et après 130 années de colonisation, aller à la plage, à la montagne ou rester chez soi à regarder la télévision en guise de célébration, signifie qu’il y a un sérieux problème au sein de la société algérienne.Cette grande fête-anniversaire, qui devrait être célébrée comme la journée de libération et être solennisée avec grand apparat par des défilés ainsi que des spectacles, des jeux, des sports, des fusils, des cloches, des feux de joie et des illuminations, d’un bout à l’autre de notre pays, inscrivant cette date maintenant et à jamais, est maintenant délaissée par nombre de citoyens, au grand dam de nos aïeuls et de notre histoire.
Yasmine ZOUAGHI L'EXPRESSION 05/07/2008
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