«Une énième coupure d’électricité de plus de cinq heures nous a poussés à recourir à cet ultime moyen d’expression.»
La cité Kourifa, commune des Eucalyptus, à l’est d’Alger, s’est réveillée hier sur un décor de désolation. Troncs d’arbres, pierres, pneus brûlés et autres objets hétéroclites jonchaient les principales routes menant à cette cité oubliée. C’est que les habitants sont sortis, vendredi soir, immédiatement après le f’tour pour déverser leur colère hors des murs de leurs quartiers. Ils ont alors occupé la route sur plusieurs kilomètres jusqu’au lendemain matin, c’est-à-dire jusqu’à hier vers midi, alors que les matériaux ayant servi à barricader les principales voies d’accès brûlaient encore d’un feu intense et dégageaient de denses fumées. «Une énième coupure d’électricité de plus de cinq heures nous a poussés à recourir à cet ultime moyen d’expression» disent les jeunes et les sages de cette agglomération que nous avons pu approcher hier. Constitués en comité de cité, ils brandissent en effet l’argument de la mal-vie comme principale motivation à leur action. En fait, la cité Kourifa ou ex-cité Renault, est une banlieue limitrophe de Larbâa. Elle est livrée à elle même et souffre de l’oubli, à telle enseigne qu’un mur de silence s’est dressé entre elle et ses élus. Si la manifestation de leur colère n’a heureusement débouché sur aucun incident ou violence, elle dénote néanmoins d’une totale désespérance. Les citoyens de cette bourgade semi-rurale, font état d’une longue liste d’ingrédients qui ont fini par les ghettoïser, notamment l’arrêt de la distribution d’eau potable, un réseau d’assainissement inexistant sinon anarchique et l’absence de bitumage des voies d’accès. Cette attente de lendemains meilleurs remonte à bien longtemps, explique un père de famille révolté: «Nous voulons épargner à nos enfants ce que nous avons enduré des années durant», dit-il. Il est rejoint dans sa pathétique déclaration par un autre compatriote qui brandit un procès-verbal portant le sceau de l’APC, datant de 1969 et mentionnant le goudronnage imminent de leur ville! «Que de promesses!» enchaîne alors un autre habitant aux tempes grisonnantes et qui avoue n’avoir constaté aucune amélioration depuis qu’il a habité cet endroit en 1976.En effet, la cité Kourifa fait face à un important cimetière des moudjahidine. Celui-ci fait l’objet d’une prise en charge particulière de la part des autorités, puisqu’il profite un bitumage intégral à l’intérieur comme aux alentours ainsi qu’une alimentation en eau potable et en électricité permanente. Ce traitement de faveur aura fini par souligner le contraste qui le sépare de la zone qui lui face, c’est à dire celle abritant les vivants. Soit la cité Kourifa. Une observation qui n’a donc pas échappé aux citoyens et a fini par alimenter leur courroux. Ils se demandant comment l’eau qui parvient au monument des Martyrs ne coule pas dans leurs robinets, «alors que les conduites du barrage de Kaddara passent sous leurs pieds».Et de s’interroger encore comment les autorités ont pu fermer l’oeil sur leur sort, alors que ces mêmes autorités effectuent des visites régulières dans ce cimetière lorgnant de près leur cité. Et c’est d’une voix commune qu’ils ajoutent: «Ce sont nous les morts qui nous révoltons aujourd’hui!» En longeant les artères difficilement praticables de cette cité limitrophe de l’aéroport international d’Alger, d’autres citoyens nous ont signalé l’existence d’une usine d’abattage de poulets dont «les émanations rendent l’air irrespirable».
Salim BENALIA - 22/09/2008 L'EXPRESSION
La cité Kourifa, commune des Eucalyptus, à l’est d’Alger, s’est réveillée hier sur un décor de désolation. Troncs d’arbres, pierres, pneus brûlés et autres objets hétéroclites jonchaient les principales routes menant à cette cité oubliée. C’est que les habitants sont sortis, vendredi soir, immédiatement après le f’tour pour déverser leur colère hors des murs de leurs quartiers. Ils ont alors occupé la route sur plusieurs kilomètres jusqu’au lendemain matin, c’est-à-dire jusqu’à hier vers midi, alors que les matériaux ayant servi à barricader les principales voies d’accès brûlaient encore d’un feu intense et dégageaient de denses fumées. «Une énième coupure d’électricité de plus de cinq heures nous a poussés à recourir à cet ultime moyen d’expression» disent les jeunes et les sages de cette agglomération que nous avons pu approcher hier. Constitués en comité de cité, ils brandissent en effet l’argument de la mal-vie comme principale motivation à leur action. En fait, la cité Kourifa ou ex-cité Renault, est une banlieue limitrophe de Larbâa. Elle est livrée à elle même et souffre de l’oubli, à telle enseigne qu’un mur de silence s’est dressé entre elle et ses élus. Si la manifestation de leur colère n’a heureusement débouché sur aucun incident ou violence, elle dénote néanmoins d’une totale désespérance. Les citoyens de cette bourgade semi-rurale, font état d’une longue liste d’ingrédients qui ont fini par les ghettoïser, notamment l’arrêt de la distribution d’eau potable, un réseau d’assainissement inexistant sinon anarchique et l’absence de bitumage des voies d’accès. Cette attente de lendemains meilleurs remonte à bien longtemps, explique un père de famille révolté: «Nous voulons épargner à nos enfants ce que nous avons enduré des années durant», dit-il. Il est rejoint dans sa pathétique déclaration par un autre compatriote qui brandit un procès-verbal portant le sceau de l’APC, datant de 1969 et mentionnant le goudronnage imminent de leur ville! «Que de promesses!» enchaîne alors un autre habitant aux tempes grisonnantes et qui avoue n’avoir constaté aucune amélioration depuis qu’il a habité cet endroit en 1976.En effet, la cité Kourifa fait face à un important cimetière des moudjahidine. Celui-ci fait l’objet d’une prise en charge particulière de la part des autorités, puisqu’il profite un bitumage intégral à l’intérieur comme aux alentours ainsi qu’une alimentation en eau potable et en électricité permanente. Ce traitement de faveur aura fini par souligner le contraste qui le sépare de la zone qui lui face, c’est à dire celle abritant les vivants. Soit la cité Kourifa. Une observation qui n’a donc pas échappé aux citoyens et a fini par alimenter leur courroux. Ils se demandant comment l’eau qui parvient au monument des Martyrs ne coule pas dans leurs robinets, «alors que les conduites du barrage de Kaddara passent sous leurs pieds».Et de s’interroger encore comment les autorités ont pu fermer l’oeil sur leur sort, alors que ces mêmes autorités effectuent des visites régulières dans ce cimetière lorgnant de près leur cité. Et c’est d’une voix commune qu’ils ajoutent: «Ce sont nous les morts qui nous révoltons aujourd’hui!» En longeant les artères difficilement praticables de cette cité limitrophe de l’aéroport international d’Alger, d’autres citoyens nous ont signalé l’existence d’une usine d’abattage de poulets dont «les émanations rendent l’air irrespirable».
Salim BENALIA - 22/09/2008 L'EXPRESSION
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