Le Parlement vient de voter les amendements apportés à la Constitution. Etes-vous de ceux qui pensent que la révision ne touche pas les équilibres fondamentaux des pouvoirs ?
En fait, le Parlement ne vient pas de voter, mais il vient d’entériner les amendements apportés à la Constitution. Et cela, lors d’une session dont le règlement intérieur n’autorisait ni les débats, ni le scrutin secret, ni même la possibilité d’utiliser le point d’ordre. Cette méthode de mise au service du Parlement a commencé avec le recours à l’ordonnance. Je voudrais rappeler que j’ai eu à faire démissionner mon gouvernement à la première tentative d’ordonnance. La population a apprécié et continue toujours de m’exprimer sa satisfaction pour cette prise de position. Malheureusement, la classe politique au pouvoir, et en dehors de celui-ci, n’a pas retenu la dimension politique d’une démission à la première tentative de légiférer par ordonnance. En effet, lorsque vous fonctionnez dans un système autoritariste, sans contre-pouvoir réel, vous devez vous imposer la discipline de respecter scrupuleusement les lois, règlements et procédures. Justement parce que, en l’absence de contre-pouvoir, personne ne vous empêchera de faire des erreurs. Dans un tel cas, la tentation de la facilité l’emportera sur la difficulté de la rigueur. C’est alors le droit chemin vers un Etat défaillant. Effectivement, la procédure de l’ordonnance a été utilisée dans des situations aussi ridicules que l’importation de la pomme de terre et dans des situations aussi graves que la révision de la Constitution. Cette révision touche incontestablement les équilibres fondamentaux du pouvoir, puisque les amendements se situent essentiellement dans le titre deuxième de l’organisation des pouvoirs. Ils touchent des points essentiels comme l’alternance au pouvoir et la distribution du pouvoir à l’intérieur de l’Exécutif. J’ai démissionné parce que j’ai vu à l’avance l’Etat dériver et le pays avec, lorsque les individus prennent les décisions aux lieu et place des institutions habilitées. L’absence de vision et la prébende au détriment des générations futures ont réalisé le reste.
Vous avez exclu votre participation à l’élection présidentielle d’avril 2009 et vous avez parlé récemment d’un changement pacifique du système. L’on se demande comment cela est-il possible alors que tout est verrouillé...
Justement parce que tout est verrouillé, vous n’avez aucune chance d’accéder au pouvoir pour réaliser le changement avec les instruments que ce pouvoir a mis en place. Ces instruments sont les partis politiques et les organisations de la société civile en leur état actuel, ce sont des élections organisées par le système, ainsi que toutes les institutions de l’Etat sans exception aucune. Donc lorsque j’appelle au changement de régime, je n’attends rien du pouvoir ni de ceux qui gravitent autour de lui. Je m’adresse à ceux qui n’ont d’autre avenir que celui qu’ils construiront dans leur pays, l’Algérie. Les Algériens et Algériennes auxquels je m’adresse vivent la décennie la plus difficile de leur vie. Ils font face à la gestion de la colère dans toutes ses manifestations (émeutes, grèves, déviations sociales, harraga…). Ils doivent affronter, en tant que pays très fortement dépendant de l’extérieur, une crise mondiale d’une ampleur jamais égalée depuis la Grande dépression. Beaucoup disent que la classe politique est trop divisée, que la jeunesse est trop désillusionnée pour être capables de se tenir ensemble et travailler vers un objectif commun. C’est la propagande du fatalisme, au grand bonheur des partisans du statu quo. Je dis non, les gens sont capables de se mettre ensemble pour sauver le pays. Ils ont besoin de dirigeants capables de parler calmement, d’écouter attentivement, de trouver des solutions et de tenir parole. C’est l’antigouvernance qui a créé cette force d’inertie démobilisatrice qui gangrène le pays et le condamne lentement mais sûrement à une régression, pur stigmate d’un Etat défaillant. Donc lorsque je parle de changement dans le calme et la sérénité, je travaille à l’élaboration de nouveaux instruments pour la réalisation de ce changement. Ces nouveaux instruments concernent essentiellement la vision, c’est-à-dire expliquer la situation actuelle du pays, la situation vers laquelle il va dériver sans le changement et la situation à laquelle il peut prétendre s’il y a un changement de régime. Ils concernent également la capacité de rupture avec le régime en place, c’est-à-dire expliquer que malgré la fermeture de tous les canaux de progrès, il est possible de mobiliser les gens en faveur du changement, de le mettre en œuvre et de construire un nouveau projet de société, un Etat protecteur et développeur, de même qu’une économie productive générant des flux de revenus durables au bénéfice de tous. Il faut bien considérer qu’il est impossible de réussir le changement en utilisant les instruments mis en place par le régime actuel ni en s’inscrivant dans son agenda et encore moins à espérer un changement de l’intérieur du système. Seulement, le moment n’est pas encore propice pour présenter, dans le détail, ces nouveaux instruments sur lesquels je travaille.
Maintes fois, vous avez critiqué la manière dont sont gérées les affaires du pays en général et en particulier l’économie. Quelle analyse faites-vous de la situation, à la lumière de la crise financière internationale et la récession économique qui en découle ?
La crise financière internationale est une crise d’ajustement et non une crise conjoncturelle. Elle est par conséquent profonde et il faudra beaucoup de temps pour la solutionner. Le temps de trouver les instruments adéquats à un nouvel environnement technologique. Le monde est passé de la dominance de la technologie industrielle vers celle des nouvelles technologies de l’informatique et des communications (NTIC). C’est la globalisation de la finance, du commerce et de la production. C’est la perméabilité des frontières, avec pour conséquence pour les nations soit la contagion, soit l’exclusion. C’est la transition de la société industrielle vers la société des services. Il y a, par conséquent, inadéquation des instruments de gestion actuels avec ce nouvel environnement. Comme le changement se fait à une vitesse jamais égalée auparavant, il y a de la difficulté à s’ajuster. La crise touche en premier lieu le système financier parce que celui-ci a réussi, avant tous les autres, à utiliser les nouveaux instruments qu’autorisent les NTIC, mais la vitesse de changement a dépassé la capacité de suivi des institutions de régulation, c’est alors la crise et l’incapacité d’y faire face avec les instruments actuels de régulation et la difficulté d’imaginer les nouveaux. L’ajustement prendra du temps à se réaliser, d’où la persistance de la crise. Bien sûr, cette crise financière se manifestera également dans le secteur réel par la récession. Elle aura des conséquences importantes dans notre pays. Mais j’insiste pour annoncer que la crise financière n’est que la première manifestation de toute une série de crises d’ajustement que connaîtront tous les autres secteurs de l’activité humaine, partout dans le monde. Notre pays et aucun autre pays ne pourront y échapper. D’où l’importance de la bonne gouvernance, de la promotion des compétences nationales, de l’avènement d’une nouvelle génération de dirigeants.
Le ministre des Finances vient d’annoncer qu’il sera procédé à la révision de la stratégie économique du pays, des signes en ont été déjà donnés en juin avec les directives du chef du gouvernement concernant la part de l’Etat dans les nouveaux projets d’investissement et la création de nouvelles entreprises publiques. Qu’en pensez-vous ?
Je pense que la situation est beaucoup plus préoccupante pour être traitée avec des mesures partielles ou des effets d’annonce. Cela fait tellement longtemps que l’on parle de réformes et de nouvelles stratégies pour que je puisse leur accorder une quelconque attention, face à la situation que je viens de présenter.
Depuis 10 ans, l’on ne cesse de parler de la nécessaire et impérative indépendance vis-à-avis des ressources pétrolières. Mais nos exportations hors hydrocarbures n’arrivent toujours pas à franchir le seuil d’un milliard de dollars. A quoi est dû, à votre avis, cette incapacité de relancer la machine de l’économie nationale ?
La dépendance des ressources pétrolières ne concerne pas seulement les exportations, mais elle concerne surtout le budget. Or, plus on parle de l’indépendance plus on s’enfonce dans la dépendance. La fiscalité pétrolière représentait 20% des recettes budgétaires en 1970, 45% en 1978, 39% en 1989, 49% en 1998 et 76% en 2007. Autrement dit, notre dépendance budgétaire des ressources pétrolières s’est très fortement aggravée durant la dernière décennie, passant de 49% des recettes totales en 1998 à 76% de celles-ci en 2007. C’est le chemin inverse à celui annoncé par le discours officiel. C’est une plus grande vulnérabilité et une plus grande volatilité de notre économie. L’incapacité de relancer la machine de l’économie est due, comme je l’ai déjà expliqué en 2001, à un incroyable règne de l’approximatif, de l’illisibilité et de l’illusion. L’optimisme inconscient, qui règne chez les dirigeants, les empêche d’anticiper les obstacles. C’est alors l’immobilisme. Il faut bien noter que lorsque vous parlez d’un milliard de dollars d’exportations hors hydrocarbures, il s’agit pour l’essentiel de l’exportation de minerais, donc des ressources du sous-sol non renouvelables aussi.
Quel est votre point de vue sur le remboursement de la dette extérieure par anticipation ?
Il faut dire que lorsque le rééchelonnement a été réalisé en 1994, il s’est fait sur une projection d’une balance de paiement viable à 18 dollars le baril et la dette devrait s’éteindre en 2011. Donc, lorsque vous avez plus de 100 milliards de dollars de réserves de change, le fait de payer par anticipation 11 milliards de dollars ne changera rien à l’image du pays à l’extérieur. Mais il faut bien comprendre q’un paiement par anticipation signifie une ponction sur les ressources du Trésor en dinar. Cela veut dire que cet argent aurait pu être utilisé pour construire des écoles, des hôpitaux et autres infrastructures.
Certains pensent aussi que le fait de placer les réserves de change à l’étranger pourrait faire perdre de l’argent à l’Algérie. Etes-vous de ceux-là ?
Le manque à gagner est aussi une perte par excès de prudence en plaçant ses réserves dans des endroits les plus sûrs, mais bien entendu avec les rendements les plus faibles. Le plus important cependant : nous n’avons aucun besoin de ces ressources importantes de réserves. 30 milliards de dollars auraient suffi largement pour stabiliser le taux de change.
Mauvaise gouvernance, diriez-vous alors ?
Ce qui nous menace sérieusement, aujourd’hui, ce serait le basculement dans une anarchie rythmée par les révoltes de gens assoiffés de vengeance, décidés à détruire, faute de perspectives solides de changement, tout ce qui représente une référence au régime prédateur responsable de leur misère.Il est temps de mettre un terme à ce que nous endurons depuis longtemps, il est temps que la violence cesse d’être le seul moyen de gouvernance que nous puissions adopter. Le peuple algérien veut que l’Algérie rejoigne le concert des nations développées et bien gouvernées. Alors mobilisons-nous, chacun là où il se trouve et avec ce qu’il peut, pour qu’ensemble nous partagions les rêves et les espoirs de nos compatriotes.
Par Said Rabia - LA LIBERTE 23/11/2008
En fait, le Parlement ne vient pas de voter, mais il vient d’entériner les amendements apportés à la Constitution. Et cela, lors d’une session dont le règlement intérieur n’autorisait ni les débats, ni le scrutin secret, ni même la possibilité d’utiliser le point d’ordre. Cette méthode de mise au service du Parlement a commencé avec le recours à l’ordonnance. Je voudrais rappeler que j’ai eu à faire démissionner mon gouvernement à la première tentative d’ordonnance. La population a apprécié et continue toujours de m’exprimer sa satisfaction pour cette prise de position. Malheureusement, la classe politique au pouvoir, et en dehors de celui-ci, n’a pas retenu la dimension politique d’une démission à la première tentative de légiférer par ordonnance. En effet, lorsque vous fonctionnez dans un système autoritariste, sans contre-pouvoir réel, vous devez vous imposer la discipline de respecter scrupuleusement les lois, règlements et procédures. Justement parce que, en l’absence de contre-pouvoir, personne ne vous empêchera de faire des erreurs. Dans un tel cas, la tentation de la facilité l’emportera sur la difficulté de la rigueur. C’est alors le droit chemin vers un Etat défaillant. Effectivement, la procédure de l’ordonnance a été utilisée dans des situations aussi ridicules que l’importation de la pomme de terre et dans des situations aussi graves que la révision de la Constitution. Cette révision touche incontestablement les équilibres fondamentaux du pouvoir, puisque les amendements se situent essentiellement dans le titre deuxième de l’organisation des pouvoirs. Ils touchent des points essentiels comme l’alternance au pouvoir et la distribution du pouvoir à l’intérieur de l’Exécutif. J’ai démissionné parce que j’ai vu à l’avance l’Etat dériver et le pays avec, lorsque les individus prennent les décisions aux lieu et place des institutions habilitées. L’absence de vision et la prébende au détriment des générations futures ont réalisé le reste.
Vous avez exclu votre participation à l’élection présidentielle d’avril 2009 et vous avez parlé récemment d’un changement pacifique du système. L’on se demande comment cela est-il possible alors que tout est verrouillé...
Justement parce que tout est verrouillé, vous n’avez aucune chance d’accéder au pouvoir pour réaliser le changement avec les instruments que ce pouvoir a mis en place. Ces instruments sont les partis politiques et les organisations de la société civile en leur état actuel, ce sont des élections organisées par le système, ainsi que toutes les institutions de l’Etat sans exception aucune. Donc lorsque j’appelle au changement de régime, je n’attends rien du pouvoir ni de ceux qui gravitent autour de lui. Je m’adresse à ceux qui n’ont d’autre avenir que celui qu’ils construiront dans leur pays, l’Algérie. Les Algériens et Algériennes auxquels je m’adresse vivent la décennie la plus difficile de leur vie. Ils font face à la gestion de la colère dans toutes ses manifestations (émeutes, grèves, déviations sociales, harraga…). Ils doivent affronter, en tant que pays très fortement dépendant de l’extérieur, une crise mondiale d’une ampleur jamais égalée depuis la Grande dépression. Beaucoup disent que la classe politique est trop divisée, que la jeunesse est trop désillusionnée pour être capables de se tenir ensemble et travailler vers un objectif commun. C’est la propagande du fatalisme, au grand bonheur des partisans du statu quo. Je dis non, les gens sont capables de se mettre ensemble pour sauver le pays. Ils ont besoin de dirigeants capables de parler calmement, d’écouter attentivement, de trouver des solutions et de tenir parole. C’est l’antigouvernance qui a créé cette force d’inertie démobilisatrice qui gangrène le pays et le condamne lentement mais sûrement à une régression, pur stigmate d’un Etat défaillant. Donc lorsque je parle de changement dans le calme et la sérénité, je travaille à l’élaboration de nouveaux instruments pour la réalisation de ce changement. Ces nouveaux instruments concernent essentiellement la vision, c’est-à-dire expliquer la situation actuelle du pays, la situation vers laquelle il va dériver sans le changement et la situation à laquelle il peut prétendre s’il y a un changement de régime. Ils concernent également la capacité de rupture avec le régime en place, c’est-à-dire expliquer que malgré la fermeture de tous les canaux de progrès, il est possible de mobiliser les gens en faveur du changement, de le mettre en œuvre et de construire un nouveau projet de société, un Etat protecteur et développeur, de même qu’une économie productive générant des flux de revenus durables au bénéfice de tous. Il faut bien considérer qu’il est impossible de réussir le changement en utilisant les instruments mis en place par le régime actuel ni en s’inscrivant dans son agenda et encore moins à espérer un changement de l’intérieur du système. Seulement, le moment n’est pas encore propice pour présenter, dans le détail, ces nouveaux instruments sur lesquels je travaille.
Maintes fois, vous avez critiqué la manière dont sont gérées les affaires du pays en général et en particulier l’économie. Quelle analyse faites-vous de la situation, à la lumière de la crise financière internationale et la récession économique qui en découle ?
La crise financière internationale est une crise d’ajustement et non une crise conjoncturelle. Elle est par conséquent profonde et il faudra beaucoup de temps pour la solutionner. Le temps de trouver les instruments adéquats à un nouvel environnement technologique. Le monde est passé de la dominance de la technologie industrielle vers celle des nouvelles technologies de l’informatique et des communications (NTIC). C’est la globalisation de la finance, du commerce et de la production. C’est la perméabilité des frontières, avec pour conséquence pour les nations soit la contagion, soit l’exclusion. C’est la transition de la société industrielle vers la société des services. Il y a, par conséquent, inadéquation des instruments de gestion actuels avec ce nouvel environnement. Comme le changement se fait à une vitesse jamais égalée auparavant, il y a de la difficulté à s’ajuster. La crise touche en premier lieu le système financier parce que celui-ci a réussi, avant tous les autres, à utiliser les nouveaux instruments qu’autorisent les NTIC, mais la vitesse de changement a dépassé la capacité de suivi des institutions de régulation, c’est alors la crise et l’incapacité d’y faire face avec les instruments actuels de régulation et la difficulté d’imaginer les nouveaux. L’ajustement prendra du temps à se réaliser, d’où la persistance de la crise. Bien sûr, cette crise financière se manifestera également dans le secteur réel par la récession. Elle aura des conséquences importantes dans notre pays. Mais j’insiste pour annoncer que la crise financière n’est que la première manifestation de toute une série de crises d’ajustement que connaîtront tous les autres secteurs de l’activité humaine, partout dans le monde. Notre pays et aucun autre pays ne pourront y échapper. D’où l’importance de la bonne gouvernance, de la promotion des compétences nationales, de l’avènement d’une nouvelle génération de dirigeants.
Le ministre des Finances vient d’annoncer qu’il sera procédé à la révision de la stratégie économique du pays, des signes en ont été déjà donnés en juin avec les directives du chef du gouvernement concernant la part de l’Etat dans les nouveaux projets d’investissement et la création de nouvelles entreprises publiques. Qu’en pensez-vous ?
Je pense que la situation est beaucoup plus préoccupante pour être traitée avec des mesures partielles ou des effets d’annonce. Cela fait tellement longtemps que l’on parle de réformes et de nouvelles stratégies pour que je puisse leur accorder une quelconque attention, face à la situation que je viens de présenter.
Depuis 10 ans, l’on ne cesse de parler de la nécessaire et impérative indépendance vis-à-avis des ressources pétrolières. Mais nos exportations hors hydrocarbures n’arrivent toujours pas à franchir le seuil d’un milliard de dollars. A quoi est dû, à votre avis, cette incapacité de relancer la machine de l’économie nationale ?
La dépendance des ressources pétrolières ne concerne pas seulement les exportations, mais elle concerne surtout le budget. Or, plus on parle de l’indépendance plus on s’enfonce dans la dépendance. La fiscalité pétrolière représentait 20% des recettes budgétaires en 1970, 45% en 1978, 39% en 1989, 49% en 1998 et 76% en 2007. Autrement dit, notre dépendance budgétaire des ressources pétrolières s’est très fortement aggravée durant la dernière décennie, passant de 49% des recettes totales en 1998 à 76% de celles-ci en 2007. C’est le chemin inverse à celui annoncé par le discours officiel. C’est une plus grande vulnérabilité et une plus grande volatilité de notre économie. L’incapacité de relancer la machine de l’économie est due, comme je l’ai déjà expliqué en 2001, à un incroyable règne de l’approximatif, de l’illisibilité et de l’illusion. L’optimisme inconscient, qui règne chez les dirigeants, les empêche d’anticiper les obstacles. C’est alors l’immobilisme. Il faut bien noter que lorsque vous parlez d’un milliard de dollars d’exportations hors hydrocarbures, il s’agit pour l’essentiel de l’exportation de minerais, donc des ressources du sous-sol non renouvelables aussi.
Quel est votre point de vue sur le remboursement de la dette extérieure par anticipation ?
Il faut dire que lorsque le rééchelonnement a été réalisé en 1994, il s’est fait sur une projection d’une balance de paiement viable à 18 dollars le baril et la dette devrait s’éteindre en 2011. Donc, lorsque vous avez plus de 100 milliards de dollars de réserves de change, le fait de payer par anticipation 11 milliards de dollars ne changera rien à l’image du pays à l’extérieur. Mais il faut bien comprendre q’un paiement par anticipation signifie une ponction sur les ressources du Trésor en dinar. Cela veut dire que cet argent aurait pu être utilisé pour construire des écoles, des hôpitaux et autres infrastructures.
Certains pensent aussi que le fait de placer les réserves de change à l’étranger pourrait faire perdre de l’argent à l’Algérie. Etes-vous de ceux-là ?
Le manque à gagner est aussi une perte par excès de prudence en plaçant ses réserves dans des endroits les plus sûrs, mais bien entendu avec les rendements les plus faibles. Le plus important cependant : nous n’avons aucun besoin de ces ressources importantes de réserves. 30 milliards de dollars auraient suffi largement pour stabiliser le taux de change.
Mauvaise gouvernance, diriez-vous alors ?
Ce qui nous menace sérieusement, aujourd’hui, ce serait le basculement dans une anarchie rythmée par les révoltes de gens assoiffés de vengeance, décidés à détruire, faute de perspectives solides de changement, tout ce qui représente une référence au régime prédateur responsable de leur misère.Il est temps de mettre un terme à ce que nous endurons depuis longtemps, il est temps que la violence cesse d’être le seul moyen de gouvernance que nous puissions adopter. Le peuple algérien veut que l’Algérie rejoigne le concert des nations développées et bien gouvernées. Alors mobilisons-nous, chacun là où il se trouve et avec ce qu’il peut, pour qu’ensemble nous partagions les rêves et les espoirs de nos compatriotes.
Par Said Rabia - LA LIBERTE 23/11/2008
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