Friday, May 14, 2010

Décryptage.Pillards en Algérie

Il faut toujours lire les rapports, souvent assommants, produits par Bruxelles. C’est ce que fait l’Esisc (acronyme anglais du Centre européen pour le renseignement stratégique et la sécurité), fondé par le journaliste d’investigation Claude Moniquet (www.esisc.org).
À partir des rapports de l’Office européen de lutte antifraude (Olaf), l’Esisc vient ainsi de révéler un dossier “oublié” pour cause de relations sensibles avec l’Algérie : des détournements massifs de l’aide humanitaire internationale destinée aux réfugiés sahraouis des camps algériens de Tindouf. Ces documents démontrent une vaste manipulation de chiffres.
Tout serait couvert par Alger et par le Front Polisario, qui revendique l’indépendance de l’ancien Sahara espagnol, rattaché au Maroc depuis 1976. L’un et l’autre refusent tout recensement de ces populations par l’Onu. Analyse de l’Esisc : « Le refus du Polisario est principalement motivé par les profits illégaux que les dirigeants du Front séparatiste opèrent grâce à une surestimation du nombre de réfugiés et, par voie de conséquence, à une aide humanitaire plus importante. »
Politiquement, l’Algérie ne tient pas au recensement (le dernier date de 1974). Financièrement non plus, parce que les trucages permettent des détournements massifs. « En 1978, l’Algérie parle de 5000 réfugiés… Dans les années1980, le Polisario revendique 300000personnes alors que certaines ONG acquises à sa cause avancent le chiffre ahurissant de 700000 réfugiés. Depuis le milieu des années 1990, tant le Polisario que les autorités algériennes estiment la population sahraouie des camps à 165000 personnes. » Pas dupes, le HCR et le Programme alimentaire mondial ont fixé ce chiffre à 90000 réfugiés en 2005. Il est sans doute de 40000 !
Grâce aux balises de géolocalisation dissimulées par l’Olaf dans des conteneurs destinés au Polisario, on sait que l’aide humanitaire débarquée à Oran met 48jours en moyenne (!) pour arriver à Tindouf. Une grande partie s’est alors déjà “évaporée” pour être revendue sur les marchés mauritanien et algérien : « Le Croissant-Rouge algérien est le premier bénéficiaire du détournement de l’aide, suivi par les dirigeants du Front Polisario qui profitent de cette manne financière pour acquérir des armes, mais aussi et surtout des biens immobiliers personnels aux Canaries ou en Espagne. »
Selon la règle généreuse adoptée par l’Union, une partie de l’aide est achetée en Algérie même où l’État perçoit des taxes, en contradiction avec le droit humanitaire. « En d’autres mots, indique l’Esisc, une part de l’argent des contribuables européens destiné à l’aide humanitaire sert donc à enrichir l’État algérien par le biais de son système fiscal. »
Frédéric Pons

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